La loi 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforçant la résilience face à ses effets a été promulguée le 21 août dernier. Il y a près d’un an, ce texte a marqué le point de départ de l’objectif de zéro artificialisation nette des sols d’ici 2050, intégrant ainsi des mesures importantes à destination des territoires qui les impacteront durablement.
Dans un département comme le nôtre, nous sommes confrontés au quotidien aux difficultés que rencontrent nos concitoyens pour se loger, en milieu urbain comme en milieu rural.
L’attractivité naturelle de la Haute-Savoie fait que de plus en plus la demande est trop forte, l’offre insuffisante, et que les prix de l’immobilier flambent. Ces facteurs, auxquels s’ajoutent des contraintes réglementaires sévères, créent ainsi une véritable pénurie de logements dans nos communes.
Cette situation impacte aussi nos entreprises qui peinent à s’implanter, à recruter, tout cela créant un véritable obstacle au développement et au rayonnement économique et social de notre territoire.
Dès les prémices de l'examen de ce texte en mars 2021, redoutant les effets de bord de ce dispositif, j'avais organisé une rencontre avec l'ensemble des EPCI de Haute-Savoie, à l'occasion d'une réunion animée par mon collègue Jean-Baptiste BLANC, Sénateur du Vaucluse et rapporteur de ce texte. Cet échange nous avait conforté dans la nécessité d'une procédure la plus territorialisée possible pour la mise en oeuvre de ce zero artificialisation nette, afin que les élus locaux conservent la maitrise de ces dispositifs.
Lors de l’examen de ce texte au Sénat, à travers de nombreux amendements ou d’interventions en commission des affaires économiques, puis récemment par l’organisation d’une visioconférence avec mon collègue Jean-Baptiste Blanc, je n'ai cessé de relayer vos nombreuses inquiétudes et d'alerter sur les conséquences de ces mesures pour des départements comme les nôtres, déjà confronté à une forte pression.
La Commission des Affaires Economiques à laquelle j'appartiens a ainsi obtenu plusieurs avancées significatives destinées à adapter et assouplir au maximum l’application de cet objectif. Malheureusement, notre satisfaction fut de courte durée puisqu' à travers les différents décrets d'application prévus par ce texte, le Gouvernement revient sur des avancées majeures obtenues par la commission des affaires économiques.
A titre d’exemple, nous avions exclu du dispositif les jardins et parcs qui étaient considérés par le Gouvernement comme artificialisés, permettant ainsi d’éviter une surenchère de l’artificialisation existante et de ne pas pénaliser davantage les modèles urbains qui ont laissé place à la nature dans les villes.
Plusieurs mois après la promulgation, le décret relatif à la nomenclature de l’artificialisation des sols est revenu sur ce que nous avions voté dans la loi à ce sujet, puisque dans ce texte, les surfaces consacrées aux parcs et jardins sont considérées comme artificialisées.
En outre, nous avions défendu une application différenciée et territorialisée de l’objectif zéro artificialisation nette, de manière à prendre en considérations les spécificités de chaque commune, ce qui était primordial pour un département comme la Haute-Savoie ! Le dispositif voté permettait de prendre en compte les spécificités locales comme dans les besoins de logements et les obligations de production de logements sociaux ou encore les besoins d’implantations d’activités économiques et l’impact des législations relatives aux zones littorales et de montagne.
Là encore, le décret relatif aux objectifs et aux règles générales du SRADDET, élaboré par la Région, va à l’encontre de ce que nous avons voté puisque le décret prévoit que ce document ne permettra pas une application souple des objectifs mais s’imposera de manière très contraignantes aux SCoT.
Par ailleurs, nous nous étions assurés que les grands projets d’intérêts collectif comme les lignes de trains ou les aéroports ne pèsent pas entièrement sur le compte foncier de la commune d’accueil. Pourtant, le décret relatif aux objectifs et aux règles du SRADDET publié par le Gouvernement a supprimé l’ensemble de ces critères au mépris de notre vote !
A de nombreuses reprises, je suis intervenue auprès du Gouvernement et en particulier du Premier Ministre sur la non conformité de ces décrets, puisqu’ils remettent en cause le vote même du Parlement et ne tiennent absolument pas compte des difficultés auxquelles les élus locaux sont quotidiennement confrontés.
En avril dernier, je vous avais informé(e)s d’un possible recours devant le Conseil d’Etat sur ce sujet. Ce sera très prochainement chose faite pour que les dispositions inscrites dans la loi finissent par s’imposer à ces décrets et puissent enfin s’appliquer dans le seul intérêt des communes !
Aujourd'hui, le Sénat donne la parole aux élus des collectivités territoriales pour identifier et résoudre les difficultés d’application concrètes de l’objectif de "zéro artificialisation nette" de la loi Climat-Résilience.
Aussi, je tenais à vous informer que la Commission des affaires économiques du Sénat a lancé une consultation visant à recueillir un grand nombre de témoignages concrets sur la mise en application du volet "lutte contre l’artificialisation" de la loi Climat-Résilience.
De l’évolution des documents d’urbanisme à l’impact sur les permis de construire, en passant par les moyens à la disposition des élus pour valoriser les friches ou "désartificialiser" les sols, le questionnaire mis en ligne permettra à l’ensemble des collectivités d’informer le Sénat de leurs difficultés et de transmettre leurs suggestions.
La consultation en ligne, ouverte jusqu’au lundi 27 juin 2022, est disponible à l’adresse suivante :
https://participation.senat.fr/loi-climat-et-r%C3%A9duction-de-l%E2%80%99artificialisation-des-sols-quels-outils-pour-une-mise-en-%C5%93uvre
Je vous invite à participer en nombre à cette consultation car cette démarche pourrait déboucher, à l’issue de la consultation, sur une proposition de loi visant à mieux articuler le déploiement d’une politique de sobriété foncière ambitieuse et concertée sur l’ensemble du territoire français.